Désiré, très désiré, le groupe originaire de Bordeaux. Ovationné, plébiscité par un public heureux de fêter les retrouvailles avec un certain Bertrand Cantat, chanteur au charisme absolu, à la démarche chaloupée et dont la voix - retrouvée -, suscite maints cris d'approbation. Noir Desir a joué à guichets fermés. Une foule compacte et heureuse se presse en rangs serrés tandis que, dehors, les plus malchanceux se contenteront de quelques bribes de décibels échappés du Pavillon. Noir Désir enfin retrouvé, entièrement maître du jeu scénique et mélodique, a fourni une prestation de haute voltige, énergique, puissante, qui nous a fait oublier, dès les premières mesures, le concert quelque peu raplapla de l'Olympia cet hiver. Comme à son habitude, Cantat parle entre les morceaux, rappelle au public qui boit ses paroles jusqu'à la lie, qu'il ne faut "jamais se laisser enfermer dans des boîtes", évoquant toutes les étiquettes - groupe "intello", puis poète et enfin politique - que l'on voudrait leur coller sur le dos. Ils sont les trois à la fois, ne se cachent pas. Leur succès tient bien évidemment à leur talent, ce son "noir dés'', identifiable au premier instant, qui vous entraîne dans un rock tourbillonnant et frénétique où le jeu de Teyssot-Gay à la guitare est d'une arrogance à vous couper le souffle. Mais aussi à leur engagement, à leur générosité authentique, qu'ils évoquent aussi bien le commandant Marcos que "la nouvelle guerre sainte économique", ou encore ces personnages d'"écorchés" qui cherchent désespérément "des gens qui s'aiment", paumés de tous les jours qui ne trouvent pas de réponses à leurs doutes, à leurs angoisses: "Comment sortir de là?" Leur public ne peut qu'éprouver ces sentiments qui trahissent une jeunesse désabusée mais non résignée, qui reprend à pleins poumons: "Soyons désinvoltes, n'ayons peur de rien..." ZOE LIN - 19 Avril 1997 |