Nulle Part Ailleurs (Canal +)

Lundi 24 mais 1999

Bertrand Cantat était Lundi 24 mai à "Nulle part ailleurs" pour faire la promotion d'un album collectif de soutien au GISTI !

Voici la retransciption des propos tenus par Bertrand Cantat dans leur quasi totalité.
Les questions posées à Rodolphe Burger et à la représentante du GISTI, invités eux aussi, ne sont pas prises en compte ici, désolé.

 

Le clip (réalisé par Jacques Audiard) d'une chanson emprunté, à l'occasion du concert, à Gainsbourg, "Les petits papiers", vient d'être diffusé.

G. Durand: À un moment, je crois me souvenir, Bertrand, que vous étiez plus Ferré que Gainsbourg (Noir Désir interprète justement une chanson de Ferré, lors du concert) ?

B. Cantat: Ha non ! Je m'interdis absolument de choisir entre Ferré et Gainsbourg. J'aime autant prendre les deux !

G. Durant: Mais un petit peu, non ?

B. Cantat: Non, ça dépend pour quoi. Si vous voulez, Ferré a une trace libertaire beaucoup plus claire; et alors de ce côté-là, c'est vrai, il y a des choses que je trouve sublimes, et dans son suivi. Mais j'adore Gainsbourg.

NDA: La discussion se déplace vers la liberté de circulation, thème central de l'interview. Le GISTI, qui se bat pour l'obtenir, est considéré comme un doux rêveur...

G. Durand: La beauté des rêves, c'est quelque chose que Noir Désir a plusieurs fois sanctifié, joué, hurlé. C'est la base, à priori, de sortir de l'aspect un peu rationnel des choses.

B. Cantat: Oui, il faut absolument se projeter, de temps en temps, un peu plus loin. Le niveau du débat, à l'heure actuelle, est sensiblement désespérant.

G. Durant: Est-ce que vous vous sentez assez proche d'influences du rock des années 70 ? Parce que, dans l'album, il y a une allusion directe à John Lennon et à Rocking Classero.

B Cantat: Cela, c'était le sujet, peut-être un clin d'oeil de ce côté-là, du côté de la lutte.

G. Durant: Mais ils étaient à la fois le délire, la musique que vous aimez, et en même temps, de temps en temps, ils y allaient carrément.

B. Cantat: Oui, peut-être. Mais enfin, moi je nai pas de Nostalgie des années 70, pour tout dire. Mais il y a des gens qui savaient effectivement prendre des risques.

[...]

G. Durant: Mais pourquoi vous n'envisagez pas de faire un gigantesque concert, qui soit encore plus mobilisateur, parce que c'est le rôle des artistes dans cette affaire-là ?

B. Cantat: Oui, pour l'instant on est sur celui là (rires). Non, mais pourquoi pas ? C'est quelque chose qui doit se suivre étant donné qu'on n'est pas au bout de nos peines, j'en suis persuadé. Mais c'est important ce que dit Danielle (NDA: représentante du GISTI) sur "utopie et réalisme", puique finalement, la politique de l'immigration, est-ce que c'est la bonne, est-ce qu'elle est réaliste ? Je pense qu'on est là aussi pour que la question soit posée comme ça. Est-ce que c'est la bonne ? Moi je suis persuadé du contraire, donc on est là pour ça.

G. Durand fait remarquer que les artistes français sont plus préoccupés de show bis que de social. Rodolphe Burger confirme ce point de vue, et compare la France à l'Angleterre, où la situation est sensiblement meilleure.

G. Durant: Pourquoi, est-ce qu'ils ont peur de séparer leur public ? [...] C'est sordide comme préoccupation ?

B. Cantat: Vous pouvez répéter la question ? (en riant)

G. Durant: Comment ?

B. Cantat: Il doit bien y avoir une part de sordide, quelque part. Et puis, peut-être, ils ne se sentent pas du tout concernés. Il y a un manque de conscience, contrairement à ce que l'on peut croire, en France. La conscience politique s'est peut-être perdue en route.

[...]

G. Durand: L'artiste français de pure souche, ça n'existe pas, non plus ?

B. Cantat: non.

G. Durant: Donc, ils auraient pu se sentir concerné ?

B. Cantat: Ha oui ! Mais il peut y avoir tout un tas de gens qui devraient se sentir concernés au premier chef et qui ne le sont pas. Mais c'est difficile de répondre à leur place. Nous, on peut vous dire pourquoi on l'est. Mais pour eux... Oui on aimerait bien, parfois, être plus que ça, c'est vrai, je ne vous le cache pas.

[...]

G. Durant: Le prochain album, on l'attend quand ?

B. Cantat: on l'attend nous aussi. On travaille, on travaille, mais on n'a pas le temps avec toutes ces choses (rires). Mais on travaille. Non, je ne rigole pas, je n'en sais rien.

G. Durant: Le dernier, c'était il y deux ans.

B. Cantat: À peu près, oui. Depuis on a fait un album de remixes, mais enfin peu importe, peu importe.

G. Durant: ça va venir ?

B. Cantat: oui, oui, oui...

G. Durant: Et d'ici là, venez jouer un jour, ça nous fait plaisir.

B. Cantat: Mes amis me regardent (rires).

G. Durant: Comment ? D'accord.

Propos retranscrits par Florent GARNIER