Alain Bashung & Chloé Mons
Traduction : Olivier Cadiot
Musique : Rodolphe Burger

Alain Bashung vous invite à son mariage.

Alain Bashung avait demandé à Rodolphe Burger (Kat Onoma) de mettre en musique son mariage avec Chloé Mons en juin 2001.

Le label "Dernière Bande" vient de faire paraître cet enregistrement qui propose l'intégralité du "Cantique des cantiques" dans la nouvelle traduction d'Olivier Cadiot.

C'est Doctor L qui s'est chargé du mix. Rodolphe Burger, Alain Bashung et Olivier Cadiot avait déjà collaboré sur l'album Fantaisie Militaire.

http://alainbashung.free.fr/news.htm

A paraître le 4 novembre 2002 :

"Le Cantique", par Alain Bashung & Chloé Mons, traduction d'Olivier Cadiot, musique de Rodolphe Burger.

Intégrale du Cantique des Cantiques en duo, version de 30 mn.

Enregistré en juin 2001 pour le mariage de Poppée.

 

 

 

Alain Bashung

" Il faut se surpasser "

Musique. Alain Bashung sort une intégrale de ses albums et une version à la fois personnelle et complice du Cantique des cantiques. De la nuance, encore de la nuance, à flanquer le vertige.

Cette fin d'année restera marquée par l'élégante empreinte d'Alain Bashung. Après l'Imprudence qui va longtemps veiller au-dessus de la chanson française comme un sommet indépassable, le voici de retour avec une intégrale et surtout le Cantique des cantiques. Enregistré lors de sa cérémonie de mariage avec Chloé Mons, ce disque est une hypnotique mise en musique du célèbre texte biblique (traduit par l'écrivain Olivier Cadiot), réalisée avec Rodolphe Burger (Kat Onoma). Ce dernier héberge également l'objet grâce à sa maison de disques, la Dernière Bande, joyeux laboratoire où l'on trouve autant une lecture de Cadiot que le projet hybride Hôtel Robinson, un album de chansons collages, réalisé en partie à l'île de Batz avec ses habitants.

Rencontre autour d'un verre et d'une vision émancipée de la musique.

Ce qui vous intéresse, c'est une nouvelle forme entre écriture et chant ?

Burger. Il y a eu l'expression " rock récitatif " et Alain est un modèle de recherche en la matière. Tandis que le type d'écriture d'Olivier se prête incroyablement à d'autres types de position de la voix et du chant.

Bashung. Cela vient aussi de la difficulté que nous avons eue à un moment à manier la langue, à la faire sonner sur de la musique, sans que cela soit trop intellectuel ou bêta. Raconter des nuances, chercher quelque chose qui nous excite. On est content quand on est les premiers surpris. Souvent, cela vient d'une erreur ou des coïncidences comme pour le Cantique. On s'est mariés, Chloé et moi, sans pouvoir avoir d'office religieux - j'ai divorcé plusieurs fois et Chloé n'a pas été baptisée -, le curé nous a alors proposé de dire de la poésie sur un peu de musique. On avait sélectionné quelques textes, dont le Cantique des Cantiques. Et à ce moment-là, Olivier Cadiot venait de finir sa nouvelle traduction.

Chloé. Le Cantique, Olivier l'a rendu plus vivant. Les extraits que l'on avait sélectionnés dans les autres traductions étaient indicibles, cela ressemblait à un récit pour s'endormir le soir mais pas à psalmodier.

Olivier. Ce qui est intéressant ce n'est pas la sensualité. Tout le monde trouve le Cantique merveilleux : c'est l'Orient, une espèce de loukoum poétique alors que l'important, c'est que cela ait du sens.

D'un moment intime est né un objet public.

Bashung. Cela aurait pu rester comme un petit événement en lui-même et ne pas se perpétuer. C'était un souvenir, cela le reste sauf qu'il est plus palpable.

On était intimidés quand même. · un moment donné, pendant que l'on récitait, j'ai pris l'harmonica. Et je me suis rappelé que gamin j'étais enfant de chour, le curé m'aurait foutu deux beignes pour avoir joué de l'harmonica à l'église ! Là, j'étais au bord du sourire en voyant ce curé qui jouissait du moment.

Burger. Que la musique soit extrêmement discrète paraissait s'imposer. J'avais préparé des éléments très simples pour donner une pulsation, essayer de s'installer dans un temps.

Rodolphe et Olivier, à côté du Cantique, vous sortez Hôtel Robinson, Burger : Hôtel Robinson, c'est très différent. Pour le coup, ce sont des chansons, des morceaux destinés à être joués sur scène et même dansés. Ce qui rapproche les deux disques, c'est qu'ils sont liés à des circonstances, des choses qui ne sont pas préconçues, mais complètement ouvertes à l'accident, la chance, la surprise.

Vous vous êtes mariés alors que vous étiez encore en train de concevoir l'Imprudence. Est-ce que le Cantique a influencé les derniers mois d'enregistrements ?

Bashung. Je ne crois pas. Ce qui m'intéresse ce sont de nouvelles expériences. Prenez un compositeur comme Burt Bacharach (auteur de chansons pour Dionne Warwick, Tom Jones, Aretha Franklin - NDLR) : il a des mélodies très chiadées avec des harmonies. Je ne vais pas m'amuser à être plus fort que lui, je vais essayer autre chose. Cela va jusqu'à jouer avec mes lacunes, elles peuvent devenir attrayantes. Il ne faut pas oublier que l'on veut communiquer quelque chose. Alors la forme peut continuer à se définir à l'infini. Participer à des musiques de film sans trop de budget m'a très tôt habitué à bricoler. J'enregistrais un petit bout de musique sur bande et je la réinjectais dans une autre partie musicale grâce aux multi-pistes. Tout cela pour éviter de payer des séances de studio supplémentaires. J'essaye de concevoir un ensemble, qu'il y ait une cohérence entre le son de guitare, les mots. La mélodie elle-même ou le texte ne sont qu'une partie. J'assemble des choses, certaines peuvent finir par fatiguer et d'autres ont l'air d'avoir la vie dure, surnagent. Après cette sélection naturelle, il faut trouver le propos qui correspond, l'humeur. Dans mon disque, je parle du cinéaste Abel Gance ou de personnages qui ont pris des risques. On en est toujours là, il faut se surpasser. On essaie autrement, cela peut partir de la dérision jusqu'au très sérieux. On est complexe et c'est peut-être cette idée que l'on a envie de promouvoir.

Quelles sont vos lacunes ?

Bashung. Par exemple, je ne suis pas un très grand instrumentiste. J'ai appris la guitare dans un groupe, on jouait un peu de tous les styles, c'était dans une brasserie à Royan pendant l'été. Il y avait deux chanteurs, moi, je chantais un truc des Who, ensuite de Mouloudji. Il fallait quand même que j'apprenne un minimum, pour jouer Nuages, de Django Reinhardt, par exemple, mais la composition ou l'improvisation m'intéressaient plus que le travail d'instrumentiste.

Cadiot. Dans ton disque, on trouve ce dernier morceau qui reprend le premier Tel, il m'a procuré une sensation, celle que l'on n'arrive pas à trouver la latitude et la longitude du texte. Le texte devient un réservoir dans lequel piocher pour réaliser d'autres effets.

Bashung. C'est très curieux, parce que cette version on l'a enregistrée un soir après dîner. J'ai juste commencé à l'harmonica et les musiciens ne savaient pas quel morceau j'allais chanter, ils découvraient au fur et à mesure. Dans le texte de Tel, il y a cette phrase : " Laisse venir. " Mais je m'adressais également à eux, comme si je les dirigeais. Dans la baille et on rame. Cette version, elle montre à quel point, même en essayant de se sentir libre, on a quand même des rails dans la tête, une sorte de réflexe prémédité. Et tout cela peut s'évaporer dans certaines conditions. Cela fout le vertige un peu mais c'est jouissif en tout cas. Ils ne savaient pas où ils allaient, moi non plus. Et on était content.

Vincent Brunner - 13 Décembre 2002 - l'humanité

Alain Bashung et Chloé Mons, le Cantique des cantiques ; Rodolphe Burger et Olivier Cadiot, Hôtel Robinson ; Olivier Cadiot, Lecture de retour définitif et durable de l'être aimé (la Dernière Bande/Wagram) ; Alain Bashung, l'Imprudence et les Hauts de Bashung (Barclay).