Kat Onoma : que sera votre vie sans ?

De la lave. De la lave gorgée d’électricité et de chaleur s’est écoulée du collectif Strasbourgeois Kat Onoma, lundi et mardi soir, au Vauban, pétrifiant - de bonheur cette fois-là - les spectateurs du Vauban comme elle l’avait fait des habitants de Pompéi.

Notes tendues de Philippe Poirier, basse virtuose, swing de la trompette, et la voix « rauque’n roll » de Rodolphe Burger : indispensable Kat Onoma.

L’âme du Vauban et celle de la musique de Kat Onoma ont communié, deux nuits durant. C’est bien de cela qu’il s’est agi, lundi et mardi soir, au sous-sol du cabaret brestois qui recevait le collectif strasbourgeois pour les premières dates de sa tournée française.

Fulgurance rock’n roll

Les membres de Kat Onoma, qui reviennent d’une longue absence, ont déversé un fluide de jouvence, un baume brûlant et apaisant à la fois. Leur art, associant plus que jamais intemporalité et fulgurance du rock’n roll des origines, est apparu si puissant qu’il a laissé pantois, le souffle coupé, un public chevauchant leurs allégories musicales. Toujours à la poursuite, à la manière des jazzmen, de cet instant de transe que décrivait si bien Jack Kerouac, ils ont bouleversé par leur cohésion, leur bonheur évident à jouer et à retrouver la scène.

Cathédrale sonore

L’essentiel de leur tour de chant était composé des compositions de leur dernier et splendide album éponyme. Sur scène, les morceaux sont apparus magnifiés. Leur force prenait une dimension presque tellurique, décuplée par les notes tendues de Philippe Poirier, par une basse virtuose, par le swing élégant et suranné de la trompette, par la voix unique de Rodolphe Burger, clef de voûte de la cathédrale sonore. Et les notes n’en finissaient pas de rouler, de l’enrouler comme des papillons jouant autour d’un sachem indien. Le grand sorcier les magnétisait, les ensorcelait. La fantasia rappelait Lou Reed, ou encore Neil Young et Crazy Horse. Revenus de toutes les expériences musicales, les membres de kat Onoma continuent de fondre leurs repères et leurs exigences, pour n’en garder qu’une urgence maîtrisée à la lointaine parenté blues et jazz.

« Que sera votre vie quand ? », psalmodiait Rodolphe Burger. Et tout devenait limpide.

 

T. C. 25 Avril 2001 - Le Télégramme -