Depuis un peu plus de 10 ans, les Bordelais ont déjoué tous les obstacles pour devenir le groupe que l'on connait aujourd'hui: le groupe rock français de cette dernière décennie. Entre les remises en question internes et les crises récurrentes avec leur maison de disque, Noir Désir s'en est toujours bie sorti et nous promet un prochain album avant l'arrivé de l'été. En attendant l'heureux événement, Rock Mag prend son mal en patience en revenant sur l'historique complet de la bande à Cantat.

Avant même la naissance de la formation musicale du groupe, l'épopée Noir désir prend sa source en classe de seconde d'un lycée bordelais. On est en 1980. Encore sur les bancs de l'école, Bertrand (16 ans) et Serge (17 ans) se lient d'amitié et envisagent vite de monter un groupe de rock. Depuis presque 10 ans, Serge Teyssot-Gay multiplie les cours de guitare classique et n'attend qu'une chose: partager sa passion.

 



 

Premiers émois

Durant l'été 1981, Bertrand et Serge font la rencontre de Denis Barthe, alors agé de 17 ans. Le courant passe. La musique les réunits, d'abord autour de discussions interminables, puis dès la rentrée scolaire autour de véritables instruments. La formation du groupe s'engage. Denis: "Bertrand et Serge y pensaient depuis un moment déjà. Ils m'ont dit qu'il cherchaient un batteur. Je n'avais jamais touché une batterie de ma vie, mais j'ai menti et ils m'ont cru." Le trio commence alors les répétitions et les débuts respirent plutôt la cacophonie: "A l'époque, on faisait du rock comme on va jouer au foot. Avec des rêves de grandeur, mais aussi simplement pour rigoler entre copains. On ne jouait pas très bien, voire franchement mal pour certains d'entre nous, mais on s'en foutait". En 1981, un premier bassiste, Vincent, vient les rejoindre. Le groupe passe pas mal de temps dans les salles de concerts de la région pour aller voir Neil Young, AC/DC, The Clash ou Bob Marley. A l'époque, ils n'osaient même pas s'imaginer à la place de ces icones, mais le rêve était là, latent.

Baptême et Turpitudes

La même année, la musique et les textes prennent forme peu à peu. L'idéologie politique est déjà présente, alors que le groupe débute à peine: "On parlait de choses que l'on connaissait mal, des problemes qu'on voyait avec nos yeux d'ados. Mais malgré cette naïveté, il était important de dire des choses, de donner des points de vue." Le quatuor arrive alors à se chercher un nom et s'arréte sur Psychoz avant 6.35 (qui ne servira que 2 mois) et Station Désir proposé par Bertrand. Le chois s'arrête quelques mois plus tard sur Noirs Désirs au pluriel. Pourtant en 1982, alors que tout commence à se mettre doucement en place, Serge décide subitement de quitter le groupe: "Bertrand et Denis avaient un côté très branleur, alors que moi, je voulais jouer, jouer, jouer,. Je rêvais de méthode de concentration." .Teyssot-Gay s'évade alors pour créer BAM (Boite A Musique). Cantat et Denis Barthe partent à la recherche d'un nouveau guitariste, alors même que le bassiste Frédéric Vidalenc arrive en provenance de Dernier Métro, un autre groupe local réputé. Un an plus tard en 1983, c'est Bertrand qui s'éloigne de Noirs Désirs pour cause de petits désordres amoureux. Emmanuel Ory-Weil (futur manager du groupe) prend donc la place de chanteur laissé vacante, alors que le guitariste Luc Robène fait son apparition en remplacement de Sergio. Le groupe marche comme ça pendant 6 mois, avant que Bertrand ne revienne. Enchaînents des concerts maquettes; la formation se rôde encore au exigence du monde musical.

Premiers contacts

En 1984, le groupe se fait peu à peu connaître et les premieres propositions de production de single se font jour malgré les refus réitérés du collectif: "On ne pensait pas pouvoir montrer toutes les facettes du groupe sur 2 titres. On voulait plus de place, plus de temps." Au même moment, l'entente musicale de Luc Robène avec le reste du groupe ne fait plus l'unanimité. En 1985, ce dernier quitte Noirs Désirs. Bertrand propose aux autres membres de réhabilliter Sergio. Tout le monde se remet au travail, les démos commencent a inonder le Sud-Ouest, les concerts rencontrent un écho largement favorable: "Les gens disaient que nous avions une energie, une âme et surtout un vértiable chanteur, ce qui n'est pas toujours le cas dans les groupes locaux. Déjà, à l'époque, Bertrand dégageait un truc incroyable sur scène." En 1986, le groupe rencontre Théo Hakola (ex-Orchestre Rouge, puis Passion Fodder) qui tombe sous le charme de ce rock à la fois énergique et poétique. Celui-ci tape à la porte de sa propre maison de disque (Barclay) et cherche à placer les Bordelais entre de bonnes mains. Après avoir vu le groupe sur scène, le directeur artistique du label rencontre Noir Désir: "C'était a Bordeaux, au Chat Bleu, on était très remontés ce soir-là. Après le concert, Barclay nous a proposé d'enregistrer un single. Deux mois ont passé et l'on s'est l'on s'est mis d'accord sur l'idée d'un mini-album." En juin 86 Noirs Désirs (toujours au pluriel) signe chez Barclay qui appose sa signature, la maison de siques demande au groupe de changer de nom, onsidérant celui-ci comme passé de mode. Premier bras de fer, minime concession, les Bordelais s'arrêtent sur Noir désir (sans pluriel).

Starting-block

Durant l'été 86, la bande à Cantat entre en studio d'enregistrement à Bruxelles. En une vingtaine de jours, Noir Désir travaille au studio ICP, aux côtés de Théo Hakola et délivre les 6 titres du mini-album. Les ex-étudiants réfractaires se retrouvent ainsi propulsés du jour au lendemain dans le monde du buisness, mais cela ne siffira pas à faire oublier les origines modestes du groupe. Sergio: "Je me souviens avoir pensé que toute cette histoire coûtais beaucoup d'argent. Un soir, le patron de la maison de disque nous a emmenés dîner dans un restaurant chic. J'avais envie de lui dire: Attend, on mange des sandwichs et tu me files le fric du resto." Le mois de février 1987 marque la sortie de "Où veux tu qu'je r'garde ?" Noir Désir démarre sa tournée et après une cinquantaine de concerts, le thermomètre des ventes dépasse les prévisions. Les 5000 exemplaires sont à peine écoulés que le groupe est déjà invité à jouer a Paris pour la première partie d'Higelin, au théâtre du Splendid. Malgré des débuts plutôt prometteurs, Noir Désir reste pourtant dans l'anonymat et les membres du groupe travaillent encore pour assurer leur train de vie quotidien. "On était roadies sur les concerts à Bordeaux, les grosse machines type Peter Gabriel. On était simples pousse-caisses, une bonne école pour l'humilité. On a fait ça jusqu'en 88, simplement pour bouffer"

Les sombres Héros

A la fin de la première tournée, le contrat du groupe est renouvelé pour 3 albums, mais Noir Désir passe alors une période de doute et ne parvient pas à enchaîner sur la suite. "Il s'est passé des mois complets san que rien ne sorte de nos séances de répétition. On jouait 5 heures par jour et les idées qu'on avait ne valaient pas grand-chose. C'était désespérant. On avait sans doute peur de passer à l'épreuve du premier véritable album, on se sentait vide." Les Bordelais continuent pourtant à assurer quelques concerts et commencent à jouer "Aux Sombres Heros de l'Amer", un morceau écrit au début de l'année 88. Un an plus tard, Noir Désir retourne à Bruxelles, au studio ICP, pour l'enregistrement du premier album alors même que certains textes ne sont pas encore écrits. "Deux semaines avant l'échéance, on ne savait pas encore très bien ce que le disque allait pouvoir donner. Bertrand n'avait pas completement fini ses textes. Aujourd'hui encore, on fonctionne à l'urgence", explique Serge. Sous la coupe du producteur Ian Broudie (Original Mirrors), Noir Désir délivre un premier brûlot d'une qualité rare avec des titres tendus et oppressants comme "la Chaleur" ou "Joey". La même année, en 1989, "Veuillez rendre l'âme (a qui elle appartient)" fait son apparition dans les bacs, la bande part en tournée les ventes atteignent vite 50 000 exemplaires.

Rageurs incorruptibles

Le titre "Au sombres Héros de l'Amer" que le groupe avait hésité à faire apparaître sur l'album, entre en radio, puis au Top 50 en aout 89, la machine s'emballe définitivement. "On nous a gonflé avec ce single parce que c'etait celui qu'on a proposé au public, mais le son de ce morceau ne montrait pas la totalité des choses..." Avec ses accents marins, le titre poussera même quelques âmes malintentionnées à comparer le groupe à Soldat Louis ou Licence IV ! A partir de là, Noir Désir évite de jouer le morceau sur scène. dans le même temps, les critiques ne sont pas toutes unanimes, certains allant jusqu'à étiqueter leur musique de rock poétique pour lycéen. Noir Désir prend alors l'air en URSS pour assurer les premières parties de la tournée des stars rock locales: Kino. Le Canada suivra peu de temps après, avant un retour à Paris où Noir désir remplira l'Olympia, durant 3 soirs de suite. L'album se retoruve disque d'or, le succès du goupe apporte son lot de sollicitations, les invitations télévisuelles se succèdent. Dans un poremier temps, le groupe accepte le jeu de la médiatisation et passez chez Dechavanne. "On pensait pouvoir imposer nos règles aux médias en faisant du terrorisme télévisuel, mais on a très vite déchanté." Invité a 2 reprise dans les émissions de Prime Time dont Sacrée Soirée (Foucault!), le groupe refuse en bloc, à l'encontre des conseils de sa maison de disques. "Vous pouvez toujours vous gratter, même en rêve, on fera jamais ça." Noir désir n'est pas à vendre. Et contrairement à certaines croyances, cela n'empêchera pas le public d'être présent pour la suite des aventures.

(A suivre)

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